Jim le taiseux


Tant que tu ne parles pas, ou que tu n'écris pas, personne ne sait ce que tu enfermes dans ta tête, même si c'est fou ou amoral. Jim a la pudeur des êtres cassés. Jamais il ne donne un avis, ni ne livre une pensée. Ses échanges avec autrui se limitent à l'anecdotique et quotidien de sa vie. Ainsi, il se croit protégé. Il écoute, il mémorise, et agit. Sa réflexion, le cheminement de sa pensée , restent un mystère.


Tant que tu ne dis rien, tout reste possible, tout reste « à dire » et tu peux inventer tous les dialogues que tu veux. Une fois qu'un dialogue réel a eu lieu, tout est fixé, définitivement. Tu ne peux plus revenir en arrière, tu peux juste te rétracter, réajuster. Au risque de te discréditer. Tant que tu n'as rien dit, ta pensée garde sa force. Dis la, et elle s'affaiblira.


Jim avait jadis été un grand bavard, un grand communiqueur. La vie l'a rendu muet comme une tombe. Certains en profitent et viennent jeter leurs secrets dans le puits profond de son silence. Discrétion assurée.


Mais comment résister à tant de paroles? Comment survivre à tant de silence? Les secrets portés par Jim se réveillent à la tombée de la nuit et peuplent ses insomnies. Parfois ,au cours de ses réflexions, il décide qu'au matin il ira trouver l'un ou l'autre, pour lui révéler le grave secret le concernant qu'on vient de lui confier. Mais la lumière du jour lui vole son courage et ses mots, et il ne dit rien, à personne. Au grand jour, ses projets de révélation lui apparaissent comme autant de trahisons, de délations.


Pourtant, une angoisse monte en lui. Celle d'être un jour face à sa responsabilité, sa vérité, celle de s'entendre reprocher d'avoir su et de n'avoir rien dit, rien fait pour empêcher la catastrophe. Jusqu'à quel point est on vraiment crédible en clamant « je ne savais pas »? D'autant que chacun sait qu'il est le dépositaire quasi officiel de toutes les confidences de la région. Quand le silence cesse t' il d'être discrétion pour devenir complicité? Jim est aussi embarrassé qu'un confesseur devant son évêque. Chaque jour sa conscience est mise à l'épreuve. Petits secrets familiaux, grandes trahisons, trafics en tous genres, chaque fois il se demande s'il doit respecter la vie privée de celui qui s'est confié, ou parler, voire dénoncer, pour protéger les victimes.


Lorsque le mal est fait, vieux secrets du passé, affaires de filiation ayant trouvé un nouvel équilibre, victimes déjà décédées, Jim s'apaise vite, une fois la révolte ou le dégoût surmontés. Mais si le secret porte sur l'avenir, sur les millions d'années à venir... même s'il n'est que suspicion ou légende, ne devrait il pas parler? Au risque d'être accusé de diffamation par tous ceux qui semble compromis dans ce scandale à la véracité non établie. Qu'elle est l'erreur la plus grave? Ternir à tort la réputation de nombreuses personnes? Ou menacer, si l'information est vraie, la vie même de tous les habitants de la région?


Jim se sent impuissant, mais pourtant il doit prendre une décision, choisir, puisque ne rien faire et ne rien dire est déjà un choix. Et par un jour très gris, très brumeux, un jour à la lumière presque nocturne, il ose enfin raconter.


Il raconte, sans fin. Les vannes ouvertes de ses paroles enfin libérées laissent échapper un flot incontrôlé de mots où il mêle tout: vrais et faux secrets, vieilles rumeurs et légendes modernes. Il raconte, aux amis,aux voisins, aux commerçants, au maire, au postier et ... au directeur de l'usine.


- »Je te croyais plus discret que ça,Jim. Tiens, puisque tu as répandue la nouvelle partout, viens donc les visiter, nos entrepôts souterrains pleins de fûts radioactifs qui polluent la nappe phréatique, comme ça, tu te rendras compte par toi-même »


On n'a jamais revu Jim. D'après la rumeur, il s'est perdu dans la montagne.


-2-


Assis au bord du ruisseau, le regard perdu, Jim pense à la douleur de vivre. Tant de faits, de gestes, de mots , se bousculent, s'entrechoquent, sans jamais le laisser en paix. Un jour, il fait ce rêve: il s'endort, la tête posée sur un dictionnaire ouvert, et pendant son sommeil, les mots rejoignent chacun leur place . Ainsi, il aurait enfin quelques instants de repos, une douce sérénité vide de mot.

Mais ce n'est qu'un rêve, et dans la réalité Jim n'a d'autre solution , pour sortir tous ces mots de son esprit, que de les tracer sur du papier. Alors il écrit, tout le temps, sur tout.


Il écrit les dialogues avortés où il n'a pas osé s'exprimer.

Il écrit les événements, tels qu'il aurait aimé les voir se dérouler.

Il écrit ses pensées, qu'il épargne à autrui, restant ainsi disponible pour écouter.

Il écrit ses peurs, les met en scène, pour les exorciser.

Il écrit ses révoltes, pour mieux les étouffer.


Il avait compris, depuis qu'il avait de justesse échappé à la vengeance du directeur de l'usine, qu'il avait grand intérêt à se terrer et à se taire. Caché dans la montagne, seul, anonyme, comme un ermite, un sage d'un autre siècle, il avait débarqué un jour dans un village isolé que même les touristes ne visitaient jamais. Il s'était arrangé avec un vieux paysan pour lui louer une ruine en échange d'heures de travail, et campait dedans tant bien que mal. Il s'était cru condamné à crever de silence et de solitude, et quand il en était arrivé à se cogner la tête aux mûrs de pierre rugueux, il avait pris la décision de se rendre discrètement en ville se procurer de quoi écrire, un stock de blocs notes, et une réserve de crayons.


-3-


Je pense à Jim dans sa montagne. Seul, face à lui même, et une vague d'angoisse me submerge. Laisser passer la vague. Laisser la marée se faire, ascendante, descendante. A chaque marée, qui sur le sable passe, petit à petit, la douleur de mon passé s'efface. Pourvu seulement qu'elle ne monte pas trop haut, et ne me noie pas.

Avant que la prudence ne nous conseille de nous cacher chacun de notre côté, nous avons décidé de rendez vous symboliques. L'un d'eux est un rendez vous aquatique. »Où que je sois dans la montagne, m'avait assuré Jim, je trouverai toujours un ruisseau , pour te transmettre mes pensées au fil de l'eau. » Voilà pourquoi je contemple les vagues. Laquelle de ces innombrables gouttes d'eau est passée devant Jim, laquelle est porteuse de ses pensées?

L'autre rendez vous est nocturne. Chaque soir, à la tombée de la nuit, nous regardons les mêmes étoiles. Il suffit de projeter sa pensée sur une autre échelle, celle de la région, ou même de la planète, pour prendre conscience que nous ne sommes pas si éloignés que ça.


Mais que puis- je faire d'autre pour chasser ma tristesse? Exilée, déracinée, et forcée de me fondre, anonyme, dans le tissu local. Surtout, ne rien faire qui puisse attirer l'attention, vivre comme l'habitant ordinaire , n'exprimer aucune idée originale, ne commettre aucun acte étonnant.

Comme Jim, j'ai du arrondir les angles de ma personnalité pour mieux me cacher. Lui a été obligé de fuir dans la montagne, après s'être échappé de l'usine où le directeur le retenait prisonnier en attendant de le réduire au silence. Moi, j'ai choisit l'anonymat protecteur d'une grande ville. Dans les deux cas, nous sommes condamnés à la solitude. Laquelle est pire, je ne sais pas. Celle au sein d'un village quand on n'en est pas natif, ou celle due à la présence illusoire d'une multitude de voisins?


-4-


Au fil de l'écriture, Jim remonte ses souvenirs. Les premières blessures qui l'ont amené à se taire, sont des blessures d'amitié.

Lorsqu'il était lycéen, Jim avait un ami avec lequel il avait partagé de nombreux moments agréables. Mais à l'âge où les choix s'affirment et où les personnalités s'affinent, Jim s'était dirigé vers la politique et le militantisme. Son ami, quant à lui, orientant ses études vers le commerce,n'était absolument pas intéressé par ces sujets . Avant d'atteindre le point de rupture définitif, Jim avait tout fait pour essayer de maintenir le lien amical auquel il tenait. Mais les rencontres devenaient de plus en plus éprouvantes. Par respect pour son ami, pour ne pas l'ennuyer, Jim n'abordait plus les sujets qui ne l'intéressaient pas, ou juste pour raconter une anecdote , comme on raconte sa journée de travail, sans jamais débattre du fond. Mais il était mal à l'aise de ne pouvoir communiquer librement sur un des aspects de sa vie qui lui tenait le plus à coeur . De taire ses actes et ses pensées ayant trait à ses actions militantes, Jim se sentait amputé d'une partie de sa personnalité. Autant se taire, si parler ne menait qu'au silence lui permettant de n'entendre que l'écho de ses propres paroles. Ce silence stérile était différent de celui de la connivence,plus aucune onde amicale ne l'accompagnait.


Jim guérit momentanément de cette déception grâce à une autre amitié, à l'âge de la fac. Sur les bancs des amphis, il s'était lié d'amitié avec Louis. Mais ,hasard des déterminismes, ou renforcement des sensibilités préexistantes, Louis, avait été fortement impressionné par une intervention de l'armée lors d'un forum d'orientation. Attiré par le courage physique des soldats, sensible à leur mission de maintien de la paix, et de défense du territoire, sa part de générosité et d'altruisme avait trouvé un autre terreau. Les nobles idées dont les deux jeunes avaient débattus des heures durant, leur vision du monde exaltée, leur allocentrisme désintéressé, avaient trouvé des voies de réalisation différentes, à l'aube de l'âge adulte. Louis argumentait ses choix de vie avec les mêmes mots, la même ferveur de sacrifice à l'intérêt commun que Jim. Tous deux étaient sincères, intimement convaincus d'agir pour un monde meilleur. Mais dans les moyens et l'idéologie de leurs choix respectifs, tout les séparait. Tant que les affrontements entre les deux jeunes hommes restèrent verbaux, et emprunt de respect et d'amitié, tout se passa bien.

Mais,lorsque le ministre de l'éducation voulu privatiser les universités, de gigantesques manifestations éclatèrent dans les villes universitaires, et Jim et Louis se retrouvèrent face à face, physiquement , sur le terrain. Jim, chargé par le service d'ordre de son groupement pacifiste, d'encadrer les manifs et d'éviter les débordements, et Louis, parmi les forces de l'ordre , fermement décidé à imposer les directives ministérielles par la force s'il le fallait.

Lorsqu'il y pense encore maintenant, Jim se pose la question de la légitimité de la démarche non violente. De quel droit inciter les autres à s'offrir aux coups de contre manifestants violents et de CRS armés de leur légitimité?

Bien sur ,il n'a forcé personne, et il était lui même en première ligne, mais il a pris conscience de la force de ses paroles, de son pouvoir de motivation. Et quand il revoit ,en pensée, les images de ses camarades meurtris, il se sent responsable.

De cette période mouvementée il tire deux raisons de se taire: l'inutilité du dialogue entre opposants , et le danger des discours qui galvanisent les groupes.

A partir de cette époque de sa vie,Jim , un peu comme l'ermite Thomas Merton, qui décidait de ne pas agir à moins d'y avoir été convié,considérant toutes les autres actions comme vaine agitation, prit la résolution de ne pas parler à moins qu'on ne l'ai questionné,et tout le reste était pour lui vaines paroles.



-5-Le plus difficile n'est pas de jouer le mouton parmi les moutons qui m' entourent. Non, le plus dur, c'est quand je crois déceler, chez quelqu'un ,une proximité de pensée et que je dois quand même simuler mon adhésion aux valeurs ambiantes. Non pas par crainte d'une délation de la part de cet allié potentiel, mais parce que je sais que c'est parmi ces personnes là  que les gens de l'usine me recherchent. Je suis obligée de fuir toutes les actions, de me barricader les jours de manifs, pour ne pas être tentée de participer. Un jour pourtant, coincée dans l' ascenseur d'un parking avec des militants de retour de manif, j'ai osé un timide «je suis solidaire, vous savez». Ces quelques mots ont déclenché une réaction fort vive chez l'un d'eux: «si vous êtes solidaire, venez avec nous, ou alors taisez vous! ça sert à rien de dire qu'on est solidaire et de ne rien faire!»Il n'avait pas tord, et ne pouvait pas savoir les raisons de mon non-engagement, mais cette remarque m' a troublée très longtemps. En fait cette petite phrase exprimant la colère bien compréhensible d'un militant découragé de voir la masse de ceux qui ne réagissent pas, m'a poursuivie jusqu'à ce que je prenne, très récemment , une décision radicale: celle d'observer en spectatrice impuissante les attaques du libéralisme envers les plus faibles, j'ai décidé d'adhérer à un groupe militant, sous un faux nom,et en cachant mon passé. Je ne sais pas ce que Jim en penserai. Un an que je suis sans nouvelle. Un an que je sillonne les plages bretonnes en essayant d'imaginer le message de l'eau. Un an que je regarde les étoiles tous les soirs et que j'essaye de nous visualiser tous les deux, chacun dans notre retraite forcée. Mais ma question reste sans réponse. Que devient il?


-6-Un an que Jim écrit sans relâche, pendant tous ses moments de liberté. Il travaille un peu pour le propriétaire des mûrs où il s'abrite, et dernièrement il a été sollicité par un petit producteur de légumes pour l'aider. En échange, il peut prendre tous les fruits et légumes dont il a besoin. Les villageois ne posent pas trop de questions. Certains l'ont pris pour un immigré clandestin, d'autres pour un déserteur de l'armée ou un insoumis, mais tous ont accepté sa présence muette, en partant du principe qu'il ne faisait de mal à personne et qu'il était courageux au travail. Le fait est que les heures qu'il donne en échange de son logement et de sa nourriture sont bien supérieures à la valeur de ce qu'on lui donne. Ceux qui l'emploient sont gagnants. Il paie ainsi le prix de leur silence et de sa tranquillité. Une chose leur déplait: l'activité d'écriture de Jim. Peu en ont été témoin, car il prend soin de se cacher pour écrire, mais suffisamment l'ont vu, compris ou soupçonné, pour que certains s'inquiètent de cette activité anormale. Espionne t-il le village?Les paranoïas se réveillent. Et un soir, de retour des champs, Jim trouve sa grange-maison en feu: tout ce qu'il a écrit depuis un an a brûlé, sa santé mentale n'y résisterait pas. Alors il décide de changer de région et de stratégie de survie. Puisque se cacher est difficile, pourquoi ne pas médiatiser l'affaire? Révéler à  grande échelle ce qu'il a tenté de rendre public dans sa région?Sachant son amie cachée quelque part en Bretagne, il s'y installe à  son tour et contacte la presse.



-7-Cher Jim,

n'ayant aucun moyen de te contacter, le journal refusant de me communiquer ton adresse, et ce n'est que bienheureuse prudence, il ne me reste que ce recours: t'écrire directement au journal. J'espère qu'ils accepteront de te remettre mon message. Quelle émotion lorsque j'ai vu cet article révélant l'existence des entrepôts de fûts radioactifs. J'ai de suite cherché la signature et la lecture de ton pseudo limpide « la voix du ruisseau », fut la plus grande joie de ma vie. Ci-joint mes coordonnées, si la prudence ne t'interdit pas de me contacter, fais le très vite!


En me relisant, je suis assaillie de doutes. Si c'était un piège, tendu par les dirigeants de l'usine ? Non, personne d'autre que Jim ne pouvait imaginer une telle signature, et s'il a signé ainsi, c'est dans l'espoir que je le lise et que je le contacte. Je prends donc le risque de ce très court message.


-8-Nous avons réussi! En conjuguant l'action militante et l'information par la presse, nous avons révélé et fait éclater le scandale. La lutte à été longue et difficile, l'usine et les organismes pro- nucléaires ont usé de tous leurs pouvoirs politiques et financiers, de tous les chantages possibles. Ils nous ont accusés de vouloir détruire les emplois locaux, de couler l'économie de la région , de prôner une politique énergétique de restriction et archaïque. Nous avons tenu bon, et avons utilisé toutes les armes militantes en notre pouvoir: manifs, courriers, tracts, communiqués presse ... Puis,des organisations plus puissantes , de portée internationale ont répondu à nos appels et ont pris le relais. Après plusieurs années de combat , l'usine vient d'être condamnée et fermée , et les dépots radioactifs vidés et nettoyés, dans la mesure du possible. Jim n'est toujours pas un bavard ,mais son travail de journaliste de presse écrite lui a permis de donner une voix aux causes qui lui tiennent à cœur. En écrivant des articles, il n'est plus tiraillé entre la nécessité d'exprimer les arguments de ses luttes et l'angoisse de parler. Nous avons donc décidé de nous installer dans ce coin de Bretagne où les hasards de nos fuites nous avaient parachutés. Non pas pour fuir notre ancienne région et nos douloureux souvenirs, mais parce que c'est cette terre là  qui nous avait accueillis et offert des moyens d'action et d'expression. Mais je voudrais pour finir donner la parole à  Jim, je crois qu'il a quelque chose à  vous dire...





-9-



« Bonjour à tous les amis et sympathisants ici réunis pour fêter la réussite de notre lutte: la condamnation et la fermeture de l'usine. M'exprimer en public est encore difficile . La reconnaissance que j'éprouve m'aidera à surmonter l'épreuve, mais n'espérez pas un long discours.


Je voulais seulement vous dire que j'ai redécouvert avec vous , grâce à vous, la force de l'action commune. Sans l'effort fourni par chacun de nous, chacun à sa mesure, chacun se donnant à fond selon ses capacités, rien n'aurait été possible.

Après m'être terré un an ,dans mon mutisme et dans mon village isolé, j'ai trouvé en débarquant ici une tribu solidaire et chaleureuse, riche des personnalités qui la compose. C'est cette tribu qui m'a rendu la voix et la force de lutter de façon constructive.

Malgré les difficultés ,les tâtonnements et même les tourments internes de notre lutte, j'ai eu aussitôt l'impression de vivre dans un monde radicalement différent. Un monde où chacun s'efforce de mettre en œuvre ses valeurs et ses convictions, où chacun lutte pour des objectifs qui dépassent l'intérêt personnel, et qui parfois même , vont à l'encontre du confort individuel immédiat.

En évoluant dans ce microcosme, qui j'espère est amené à suivre la théorie de l'expansion de l'univers, car nous sommes contagieux, j'ai pu retrouver les rages mais aussi les espoirs de mon adolescence, heureusement pondérés par les expériences et réflexions de l'âge adulte.

Sans vous je vivrais encore caché et terrorisé, désarmé face à la puissance de l'argent , des politiques et des industriels qui gouvernent le monde marchand.


A vous tous ,merci. »








 







juillet et octobre 2003